Et rester vivant
Il vient de perdre son père. Un accident de voiture. Ce pourrait n'être qu'un drame comme tant d'autres. Mais à 22 ans, cela fait de lui un orphelin : deux ans plus tôt, sa mère et son frère sont décédés dans des circonstances identiques. Pour conjurer un destin loin d'être tendre avec lui, le narrateur choisit de dépenser un héritage qui lui pèse en s'embarquant dans un voyage outre-Atlantique. Il veut découvrir la Californie, et surtout Morro Bay. Son ex petite amie et son meilleur ami l'accompagnent dans cette expédition un peu folle.
Les romans dont l'intrigue s'inspire - plus ou moins largement - de la vie de l'auteur sont de plus en plus nombreux. Ces auto-fictions manquent souvent de saveur, et ne parviennent que rarement à me séduire. Pour écrire Et rester vivant, Jean-Philippe Blondel a très largement emprunté à son expérience personnelle, mais il m'a convaincue. L'écriture est de qualité, sans fioritures inutiles, alternant des passages où les phrases courtes donnent du rythme et des moments de réflexion, voire de contemplation, bien servis par un style plus confortable. La qualité essentielle de cet ouvrage est indubitablement le ton. Ni auto-apitoiement, ni sentimentalisme larmoyant. Les émotions tiennent une place centrale, mais tout en retenue. Le personnage principal n'en est que plus touchant. On prend plaisir à le suivre dans son périple américain, semé de rencontres et de découvertes, si ce n'est de révélations. Jean-Philippe Blondel a su prendre le recul nécessaire pour rendre cet épisode de sa vie accessible à tous. Il ne se contente pas de livrer un témoignage, mais est capable d'observer d'un œil critique ce moment décisif, cette croisée des chemins. Il serait bon que d'autres en prennent de la graine, afin d'épargner aux lecteurs ces guimauves larmoyantes qui encombrent les étals des librairies.
Et rester vivant, Jean-Philippe Blondel, 2011.